Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/462

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Il enceint de plus pres les murs de toutes parts,
Et pousse des travaux jusqu’au pied des ramparts.
Il aproche les ponts qu’il a mis sur le Tybre :
Le superbe Romain n’a plus que l’air de libre :
Et sans un grand secours vainement attendu,
Il voit Rome perduë, et se juge perdu.
Valere voit d’abord ce que le heros pense :
Tiburse son rival en connoist l’importance :
Et tous deux pour tâcher de sauver le Romain,
Sortent de temps en temps les armes à la main.
Chaque jour, chaque nuit, leur valeur se signale,
Mais à cette valeur l’infortune est esgale :
Et tousjours repoussez, ils connoissent enfin,
Que la grandeur romaine est proche de sa fin ;
Qu’Alaric est plus fort que la ville n’est forte ;
Et que la pasle faim en ouvrira la porte.
Ce monstre cependant, des regnes tenebreux,
Vient marcher à pas lents dans ce peuple nombreux :
Sa force est sa foiblesse, et ce nombre est sa perte :
Rome tiendroit long-temps, si Rome estoit deserte :
Mais ce nombre excessif qui la doit secourir,
Perit en gardant Rome, et Rome va perir.
Comme insensiblement les vivres se dissipent :
Et bien que les demons les flattent et les pipent,
L’on voit parmy le peuple en vain solicité,
La crainte, le chagrin, et la necessité.
Rigilde toutesfois par sa feinte allegresse,
Leur parle d’un secours de Ravenne et de Grece :