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SCHILLER

lenteurs qu’il éprouvoit en s’exprimant en français, sans redouter non plus l’opinion des auditeurs, qui étoit contraire à la sienne, sa conviction intime le fit parler. Je me servis d’abord, pour le réfuter, des armes françaises, la vivacité et la plaisanterie ; mais bientôt je démêlai dans ce que disoit Schiller tant d’idées à travers l’obstacle des mots, je fus si frappée de celle simplicité de caractère qui portoit un homme de génie à s’engager ainsi dans une lutte où les paroles manquoient à ses pensées, je le trouvai si modeste et si insouciant dans ce qui ne concemoit que ses propres succès, si fier et si animé dans la défense de ce qu’il croyoit la vérité, que je lui vouai dès cet instant une amitié pleine d’admiration.

Atteint, jeune encore, par une maladie sans espoir, ses, enfants, sa femme, qui méritoit par mille qualités touchantes l’attachement qu’il avoit pour elle, ont adouci ses derniers moments. Madame de Wollzogen, une amie digne de le comprendre, lui demanda, quelques heures avant sa mort, comment il se trouvoit : Toujours plus tranquille, lui répondit-il. En effet, n’avoit-iL pas raison de se confier à la divinité dont il avoit