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Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 1, 1814.djvu/88

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DE L’ALLEMAGNE

serve les pratiques de religion ; mais ils n’attirent point par leur éloquence. Les spectacles sont extrêmement négligés, surtout la tragédie. L’administration est conduite avec beaucoup de sagesse et de justice ; mais il y a tant de méthode en tout, qu’à peine si l’on peut s’apercevoir de l’influence des hommes. Les affaires se traitent d’après un certain ordre de numéros que rien au monde ne dérange. Des règles invariables en décident, et tout se passe dans un silence profond. Ce silence n’est pas l’effet de la terreur, car que peut-on craindre dans un pays où les vertus du monarque et les principes de l’équité dirigent tout ? Mais le profond repos des esprits comme des âmes ôte tout intérêt à la parole. Le crime ou le génie, l’intolérance ou l’enthousiasme, les passions ou l’héroïsme ne troublent ni n’exaltent l’existence. Le cabinet autrichien a passé dans le dernier siècle pour très-astucieux : ce qui ne s’accorde guère avec le caractère allemand en général ; mais souvent on prend pour une politique profonde ce qui n’est que l’alternative de l’ambition et de la foiblesse. L’histoire attribue presque toujours aux individus comme aux gouvernements plus de combinaison qu’ils n’en ont eu.

L’Autriche, réunissant dans son sein des peu-