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DES PHILOSOPHES ALLEMANDS.

menter les ouvrages de Kant. Mais aujourd’hui les philosophes allemands, d’accord avec Kant sur l’activité spontanée de la pensée, ont adopté néanmoins chacun un système particulier à cet égard. En effet, qui n’a pas essayé de se comprendre soi-même selon ses forces ? Mais parce que l’homme a donné une innombrable diversité d’explications de son être, s’ensuit-il que cet examen philosophique soit inutile ? Non, sans doute. Cette diversité même est la preuve de l’intérêt qu’un tel examen doit inspirer.

On diroit de nos jours qu’on voudroit en finir avec la nature morale et lui solder son compte en une fois, pour n’en plus entendre parler. Les uns déclarent que la langue a été fixée tel jour de tel mois, et que depuis ce moment l’introduction d’un mot nouveau seroit une barbarie. D’autres affirment que les règles dramatiques ont été définitivement arrêtées dans telle année, et que le génie qui voudroit maintenant y changer quelque chose a tort de nêtre pas né avant cette année sans appel, où l’on a terminé toutes les discussions littéraires passées, présentes et futures. Enfin, dans la métaphysique surtout, l’on a décidé que depuis Condillac on ne peut faire un pas de plus sans s’égarer. Les progrès sont encore permis aux sciences physiques, parce qu’on ne peut les leur