CHAPITRE XIII.
De la morale fondée sur l’intérêt national.
Non-seulement la morale fondée sur l’intérêt personnel met, dans les rapports des individus entre eux, des calculs de prudence et d’égoïsme qui en bannissent la sympathie, la confiance et la générosité ; mais la morale des hommes publics, de ceux qui traitent au nom des nations, doit être nécessairement pervertie par ce système. S’il est vrai que la morale des individus puisse être fondée sur leur intérêt, c’est parce que la société toute entière tend à l’ordre et punit celui qui veut s’en écarter ; mais une nation, et surtout un état puissant, est comme un être isolé que les lois de la réciprocité n’atteignent pas. On peut dire, avec vérité, qu’au bout d’un certain nombre d’années les nations injustes succombent à la haine qu’inspirent leurs injustices ; mais plusieurs