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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

l’un comme juge des vérités philosophiques ; il considère l’autre comme devant être soumise à la conscience. Le sentiment et la conscience sont employés dans ses écrits comme des termes presque synonymes ; mais la sensibilité se rapproche davantage de la sphère des émotions et par conséquent des passions qu’elles font naître.

On ne sauroit se lasser d’admirer les écrits de Kant dans lesquels la suprême loi du devoir est consacrée ; quelle chaleur vraie, quelle éloquence animée dans un sujet où d’ordinaire il ne s’agit que de réprimer ! On se sent pénétré d’un profond respect pour l’austérité d’un vieillard philosophe constamment soumis à cet invisible pouvoir de la vertu, sans autre empire que la conscience, sans autres armes que les remords, sans autres trésors à distribuer que les jouissances intérieures de l’âme, jouissances dont on ne peut même donner l’espoir pour motif, puisqu’on ne les comprend qu’après les avoir éprouvées.

Parmi les philosophes allemands, des hommes non moins vertueux que Kant, et qui se rapprochent davantage de la religion par leurs penchants, ont attribué au sentiment religieux l’o-