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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

perfide, et dont la moralité de tous les deux souffrira.

En Allemagne, il n’y a guère dans le mariage d’inégalité entre les deux sexes ; mais c’est parce que les femmes brisent aussi souvent que les hommes les nœuds les plus saints. La facilité du divorce introduit dans les rapports de famille une sorte d’anarchie qui ne laisse rien subsister dans sa vérité ni dans sa force. Il vaut encore mieux, pour maintenir quelque chose de sacré sur la terre, qu’il y ait dans le mariage une esclave que deux esprits forts.

La pureté de l’âme et de la conduite est la première gloire de la femme. Quel être dégradé ne seroit-elle pas sans l’une et sans l’autre ! Mais le bonheur général et la dignité de l’espèce humaine ne gagneroient pas moins peut-être à la fidélité de l’homme dans le mariage. En effet, qu’y a-t-il de plus beau dans l’ordre moral qu’un jeune homme qui respecte cet auguste lien ? L’opinion ne l’exige pas de lui, la société le laisse libre ; une sorte de plaisanterie barbare s’attacheroit à déjouer jusqu’aux plaintes du cœur qu’il auroit brisé, car le blâme se tourne facilement contre les victimes. Il est donc le maître, mais il s’impose des devoirs ; nul in-