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Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/293

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DU PROTESTANTISME.

Partout en Allemagne on trouve des traces des diverses luttes religieuses qui, pendant plusieurs siècles, ont occupé la nation entière. On montre encore dans la cathédrale de Prague des bas-reliefs où les dévastations commises par les Hussites sont représentées ; et la partie de l’église que les Suédois ont incendiée dans la guerre de trente ans n’est point encore rebâtie. Non loin de là, sur le pont, est placée la statue de saint Jean-Népomucène, qui aima mieux périr dans les flots que de révéler les faiblesses qu’une reine infortunée lui avoit confessées. Les monuments, et même les ruines qui attestent l’influence de la religion sur les hommes, intéressent vivement notre âme ; car les guerres d’opinions, quelque cruelles qu’elles soient, font plus d’honneur aux nations que les guerres d’intérêt.

Luther est, de tous les grands hommes que l’Allemagne a produits, celui dont le caractère étoit le plus allemand, sa fermeté avoit quelque chose de rude ; sa conviction alloit jusqu’à l’entêtement ; le courage de l’esprit étoit en lui le principe du courage de l’action : ce qu’il avoit de passionné dans l’âme ne le détournoit point des études abstraites ; et quoiqu’il attaquât de certains abus et de certains dogmes comme des préjugés,