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LA RELIGION ET L’ENTHOUSIASME.

Quand un jeune homme veut prendre une compagne, il s’adresse à la doyenne des filles ou des veuves, et lui demande celle qu’il voudroit épouser. L’on tire au sort à l’église pour savoir s’il doit ou non s’unir à la femme qu’il préfère ; et si le sort est contre lui, il renonce à sa demande. Les moraves ont tellement l’habitude de se résigner, qu’ils ne résistent point à cette décision ; et comme ils ne voient les femmes qu’à l’église, il leur en coûte moins pour renoncer à leur choix. Cette manière de prononcer sur le mariage, et sur beaucoup d’autres circonstances de la vie, indique l’esprit général du culte des moraves. Au lieu de s’en tenir à la soumission à la volonté du ciel, ils se figurent qu’ils peuvent la connoître ou par des inspirations, ou, ce qui est plus étrange encore, en interrogeant le hasard. Le devoir et les événements manifestent à l’homme les voies de Dieu sur la terre ; comment peut-il se flatter de les pénétrer par d’autres moyens ?

L’on observe d’ailleurs en général, chez les moraves, les mœurs évangéliques telles qu’elles dévoient exister du temps des apôtres dans les communautés chrétiennes. Ni les dogmes extraordinaires, ni les pratiques scrupuleuses ne