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DE LA CONTEMPLATION DE LA NATURE.

dive des nerfs qui, en affaiblissant la puissance du raisonnement, rend à l’homme l’instinct qu’il devoit jadis à la plénitude même de ses forces. Les travaux des philosophes, des savants et des poëtes en Allemagne, ont pour but de diminuer l’aride puissance du raisonnement sans obscurcir en rien les lumières. C’est ainsi que l’imagination du monde ancien peut renaître comme le phénix des cendres de toutes les erreurs.

La plupart des physiciens ont voulu expliquer, ainsi que je l’ai déjà dit, la nature comme un bon gouvernement dans lequel tout est conduit d’après de sages principes administratifs, mais c’est en vain qu’on veut transporter ce système prosaïque dans la création. Le terrible ni même le beau ne sauroient être expliqués par cette théorie circonscrite, et la nature est tour à tour trop cruelle et trop magnifique pour qu’on puisse la soumettre au genre de calcul admis dans le jugement des choses de ce monde.

Il y a des objets hideux en eux-mêmes, dont l’impression sur nous est inexplicable ; de certaines figures d’animaux, de certaines formes de plantes, de certaines combinaisons de couleurs, révoltent nos sens, bien que nous ne puissions nous rendre compte des causes de cette répu-