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LA RELIGION ET L’ENTHOUSIASME.

À peine peut-on croire que la jeunesse embellissoit ce visage dont la mort a déjà pris possession : quelques physionomies échappent par la splendeur de l’âme à la dégradation ; mais la figure humaine dans sa décadence prend souvent une expression vulgaire qui permet à peine la pitié ! les animaux perdent avec les années, il est vrai, leur force et leur agilité, mais l’incarnat de la vie ne se change point pour eux en livides couleurs, et leurs yeux éteints ne ressemblent pas à des lampes funéraires qui jettent de pâles clartés sur un visage flétri.

Lors même qu’à la fleur de l’âge la vie se retire du sein de l’homme, ni l’admiration que font naître les bouleversements de la nature, ni l’intérêt qu’excitent les débris des monuments, ne peuvent s’attacher au corps inanimé de la plus belle des créatures. L’amour qui chérissoit cette figure enchanteresse, l’amour ne peut en supporter les restes, et rien de l’homme ne demeure après lui sur la terre qui ne fasse frémir même ses amis.

Ah ! quel enseignement que les horreurs de la destruction acharnée ainsi sur la race humaine ! N’est-ce pas pour annoncer à l’homme que sa vie est ailleurs ? La nature l’humilieroit--