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KANT.

proposé de pénétrer dans le sens de l’axiome de Leibnitz, en examinant quelles sont les lois et les sentiments qui constituent l’essence de l’âme humaine indépendamment de toute expérience. La Critique de la Raison pure s’attache à montrer en quoi consistent ces lois et quels sont les objets sur lesquels elles peuvent s’exercer.

Le scepticisme, auquel le matérialisme conduit presque toujours, étoit porté si loin que Hume avoit fini par ébranler la base du raisonnement même en cherchant des arguments contre l’axiome qu’il n’y a point d’effet sans cause. Et telle est l’instabilité de la nature humaine quand on ne place pas au centre de l’âme, le principe de toute conviction, que l’incrédulité, qui commence par attaquer l’existence du monde moral, arrive à défaire aussi le monde matériel dont elle s’étoit d’abord servie pour renverser l’autre. Kant vouloit savoir si la certitude absolue étoit possible à l’esprit humain, et il ne la trouva que dans les notions nécessaires, c’est-à-dire dans toutes les lois de notre entendement, qui sont de nature à ce que nous ne puissions rien concevoir autrement que ces lois ne nous le représentent.