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Page:De Staël – La Révolution française, Tome I.djvu/196

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CONSIDÉRATIONS

CHAPITRE XV.

Quelle étoit la disposition des esprits en Europe au moment
de la convocation des états généraux.

LES lumières philosophiques, c’est-à-dire, l’appréciation des choses d’après la raison et non d’après les habitudes avoient fait de tels progrès en Europe, que les possesseurs des priviléges, rois, nobles ou prêtres, étoient les premiers à s’excuser des avantages abusifs dont ils jouissoient. Ils vouloient bien les conserver, mais ils prétendoient à l’honneur d’y être indifférens ; et les plus adroits se flattoient d’endormir assez l’opinion pour qu’elle ne leur disputât pas ce qu’ils avoient l’air de dédaigner.

L’impératrice Catherine courtisoit Voltaire ; Frédéric Il étoit presque son rival en littérature ; Joseph II étoit le philosophe le plus prononcé de ses états ; le roi de France avoit pris deux fois, en Amérique et en Hollande, le parti des sujets contre leur prince : sa politique l’avoit conduit à soutenir ceux qui combattoient contre le pouvoir royal et stathoudé-