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CONSIDÉRATIONS

vous demande de vous reporter avec moi à l’époque du mois d’août de l’année dernière.

« Le roi étoit trompé.

« Les lois étoient sans ministres, et vingt-cinq millions d’hommes sans juges ;

« Le trésor public sans fonds, sans crédit, sans moyens pour prévenir une banqueroute générale, dont on n’étoit plus séparé que par quelques jours ;

« L’autorité sans respect pour la liberté des particuliers, et sans force pour maintenir l’ordre public ; le peuple sans autre ressource que les états généraux, mais sans espérance de les obtenir, et sans confiance même dans la promesse d’un roi dont il révéroit la probité, parce qu’il s’obstinoit à croire que les ministres d’alors en éluderoient toujours l’exécution.

« À ces fléaux politiques, la nature, dans sa colère, étoit venue joindre les siens : le ravage et la désolation étoient dans les campagnes ; la famine se montroit déjà de loin, menaçant une partie du royaume.

« Le cri de la vérité est parvenu jusqu’aux oreilles du roi ; son œil s’est fixé sur ce tableau déchirant ; son cœur honnête et pur s’est senti ému ; il s’est rendu aux vœux de