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CONSIDÉRATIONS

trône ? Ce ne sont pas sans doute les parlemens qu’il a rappelés ; ce n’est pas sûrement le peuple qu’il a nourri ; ce ne sont pas les créanciers de l’état qu’il a payés, les bons citoyens dont il a secondé les vœux. Qui sont-ils donc ? Je l’ignore, il mais il en est ; la justice, la bonté reconnue du roi, ne me permettent pas d’en douter ; quels qu’ils soient, ils sont bien coupables.

« Au défaut des accusateurs, je cherche les crimes qu’ils ont pu dénoncer. Ce ministre, que le roi avoit accordé à ses peuples comme un don de son amour, comment est-il devenu tout à coup un objet d’animadversion ? Qu’a-t-il fait depuis un an ? Nous venons de le voir, je l’ai dit, je le répète : quand il n’y avoit point d’argent, il nous a payés ; quand il n’y avoit pas de pain, il nous a nourris ; quand il n’y avoit point d’autorité, il a calmé les révoltes. Je l’ai entendu accuser tour à tour d’ébranler le trône et de rendre le roi despote, de sacrifier le peuple à la noblesse, et de sacrifier la noblesse au peuple. J’ai reconnu dans cette accusation le partage ordinaire des hommes justes et impartiaux, et ce double reproche m’a paru un double hommage.