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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

Il importe, avant tout, que les juges ne puissent être ni destitués par le roi, ni renommés ou rejetés par le peuple. Si, dès les premiers jours de la révolution, tous les partis s’étoient accordés à respecter inviolablement les formes judiciaires, de combien de maux on auroit préservé la France ! Car c’est surtout pour les cas extraordinaires que les tribunaux ordinaires sont établis.

On diroit que chez nous la justice est comme une bonne femme dont on peut se servir dans le ménage les jours ouvriers, mais qui ne doit pas paroître dans les occasions solennelles ; et c’est dans ces occasions cependant que, les passions étant le plus agitées, l’impassibilité des lois devient plus nécessaire que jamais.

Le 4 février 1790, le roi s’étoit rendu à l’assemblée pour accepter, dans un discours très-bien fait, auquel M. Necker avoit travaillé, les principales lois décrétées déjà par l’assemblée. Mais le roi, dans ce même discours, montroit avec force le malheureux état du royaume, la nécessité d’améliorer et d’achever la constitution. Cette démarche étoit indispensable, parce que, les conseillers secrets du roi le représentant toujours comme captif, on excitoit la défiance du parti populaire sur ses intentions. Rien ne