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CONSIDÉRATIONS

dehors de l’administration. La crainte salutaire de toutes ces guerres, entreprises si souvent pour des querelles de rois, avoit dirigé l’assemblée constituante dans l’organisation de l’état militaire ; mais elle avoit mis tant d’entraves à l’influence de l’autorité sous ce rapport, que l’armée n’auroit pas été en état de servir au dehors ; tant on craignoit qu’elle ne put opprimer au dedans ! La réforme de la jurisprudence criminelle et l’établissement des jurés faisoient bénir le nom de l’assemblée constituante ; mais elle décréta que les juges seroient à la nomination du peuple et non à celle du roi, et qu’ils seroient réélus tous les trois ans. Cependant l’exemple de l’Angleterre et une réflexion éclairée concourent à démontrer que les juges, sous quelque gouvernement que ce soit, doivent être inamovibles, et que, dans un gouvernement monarchique, il convient que leur nomination appartienne à la couronne. Le peuple est beaucoup moins en état de connoître les qualités nécessaires pour être homme de loi que celles qu’il faut pour être député ; un mérite ostensible et des lumières universelles doivent désigner à tous les yeux un représentant du peuple, mais de longues études rendent seules capable des fonctions de magistrat.