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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

laps quand il convenoit de les traiter ainsi.

Des injustices de tout genre ont signalé ce règne de Louis XIV, objet de tant de madrigaux ; et personne n’a réclamé contre les abus d’une autorité qui étoit elle-même un abus continuel. Fénélon a seul osé élever sa voix ; mais c’est assez aux yeux de la postérité. Ce roi, si scrupuleux sur les dogmes religieux, ne l’étoit guère sur les bonnes mœurs, et ce n’est qu’à l’époque de ses revers qu’il a développé de véritables vertus. On ne se sent pas avec lui la moindre sympathie, jusqu’au moment où il fut malheureux ; alors une grandeur native reparut dans son âme.

On vante les beaux édifices que Louis XIV a fait élever. Mais nous savons par expérience que, dans tous les pays où les députés de la nation ne défendent pas l’argent du peuple, il est aisé d’en avoir pour toute espèce de dépense. Les pyramides de Memphis ont coûté plus de travail que les embellissemens de Paris, et cependant les despotes d’Égypte disposoient facilement de leurs esclaves pour les bâtir.

Attribuera-t-on aussi à Louis XIV les grands écrivains de son temps ? Il persécuta Port-Royal dont Pascal étoit le chef ; il fit mourir de chagrin Racine ; il exila Fénélon ; il s’opposa con-