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CONSIDÉRATIONS

Nous n’avons senti, pendant la révolution, que le mal de l’incrédulité, et de l’atroce violence avec laquelle on vouloit la propager ; mais les mêmes sentimens généreux qui faisoient détester la proscription du clergé, vers la fin du dix-huitième siècle, inspiroient, cinquante ans plus tôt, la haine de son intolérance. Il faut juger les actions et les écrits d’après leur date.

Nous traiterons ailleurs la grande question des dispositions religieuses de la nation françoise. Dans ce genre, comme en politique, ce n’est pas une nation de vingt-cinq millions d’hommes qu’on doit accuser ; car c’est, pour ainsi dire, quereller avec le genre humain. Mais il faut examiner pourquoi cette nation n’a pas été formée, selon le gré de quelques-uns, par d’anciennes institutions qui ont duré toutefois assez long-temps pour exercer leur influence ; il faut examiner aussi quelle est maintenant la nature des sentimens en harmonie avec le cœur des hommes : car le feu sacré n’est et ne sera jamais éteint ; mais c’est au grand jour de la vérité seulement qu’il peut reparoître.