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CONSIDÉRATIONS

nommer M. Necker directeur général du trésor royal.

Étranger et protestant, il étoit tout-à-fait hors de la ligne des choix ordinaires ; mais il avoit montré une si grande habileté en matière de finances, soit dans la compagnie des Indes, dont il étoit membre, soit dans le commerce, qu’il avoit pratiqué lui-même vingt ans, soit dans ses écrits, soit enfin dans les divers rapports qu’il avoit constamment entretenus avec les ministres du roi, depuis le duc de Choiseul jusqu’en 1776, époque de sa nomination, que M. de Maurepas fit choix de lui, seulement pour qu’il attirât de l’argent au trésor royal. M. de Maurepas n’avoit point réfléchi sur la connexion du crédit public avec les grandes mesures d’administration ; il croyoit donc que M. Necker pourroit rétablir la fortune de l’état comme celle d’une maison de banque, en faisant des spéculations heureuses. Rien n’étoit plus superficiel qu’une telle manière de concevoir les finances d’un grand empire. La révolution qui se manifestoit dans les esprits ne pouvoit être écartée du foyer même des affaires, qu’en satisfaisant l’opinion par toutes les réformes qu’elle désiroit ; il falloit aller au-devant d’elle, de peur qu’elle ne s’avançât trop ru-