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CONSIDÉRATIONS

qu’on puisse se permettre, et que le reste de cet ouvrage, j’espère, confirmera, c’est que le remède aux passions populaires n’est pas dans le despotisme, mais dans le règne de la loi.

Le fanatisme religieux présente un avenir indéfini qui exalte toutes les espérances de l’imagination ; mais les jouissances de la vie sont aussi sans bornes aux yeux de ceux qui ne les ont pas goûtées. Le vieux de la Montagne envoyoit ses sujets à la mort, à force de leur accorder des délices sur cette terre, et l’on voit souvent les hommes s’exposer à mourir pour mieux vivre. D’autre part, la vanité s’exalte par la défense des supériorités qu’elle possède ; elle paroît moins coupable que les attaquans, parce qu’une idée de propriété s’attache même aux injustices, lorsqu’elles ont existé depuis longtemps. Néanmoins les deux élémens du fanatisme religieux et du fanatisme politique subsistent toujours : la volonté de dominer, dans ceux qui sont au haut de la roue, l’ardeur de la faire tourner dans ceux qui sont en bas. Tel est le principe de toutes les violences : le prétexte change, la cause reste, et l’acharnement réciproque demeure le même. Les querelles des patriciens et des plébéiens, la guerre des esclaves, celle des paysans, celle