Page:De Staël – La Révolution française, Tome II.djvu/227

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d’aversion pour le gouvernement françois, que les princes seuls en avoient d’abord éprouvé.

On proclama la république romaine du haut du Capitole, mais il n’y avoit de républicains dans la Rome de nos jours que les statues ; et c’étoit n’avoir aucune idée de la nature de l’enthousiasme, que d’imaginer qu’en le contrefaisant on le feroit naître. Le consentement libre des peuples peut seul donner aux institutions politiques une certaine beauté native et spontanée, une harmonie naturelle qui garantisse leur durée. Le monstrueux système du despotisme dans les moyens, sous prétexte de la liberté dans le but, ne créoit que des gouvernemens à ressort, qu’il falloit remonter sans cesse, et qui s’arrêtoient dès qu’on cessoit de les faire marcher. On donnoit des fêtes à Paris avec des costumes grecs et des chars antiques, mais rien n’étoit fondé dans les âmes, et l’immoralité seule faisoit des progrès de toutes parts ; car l’opinion publique ne récompensoit ni n’intimidoit personne.

Une révolution avoit eu lieu dans l’intérieur du directoire comme dans l’intérieur d’un sérail, sans que la nation y prît la moindre part. Les nouveaux choix étoient tombés sur des hommes tellement vulgaires, que la France, tout-à-fait