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CONSIDÉRATIONS

mille royale et ses défenseurs. Jamais on n’avoit vu la parole humaine ainsi dénaturée ; les hurlemens des bêtes féroces pourroient être traduits dans ce langage.

Paris étoit divisé en quarante-huit sections, qui toutes envoyoient des députés à la barre de l’assemblée, pour dénoncer les moindres actes comme des forfaits. Quarante-quatre mille municipalités renfermoient chacune un club de jacobins qui relevoit de celui de Paris, soumis lui-même aux ordres des faubourgs. Jamais une ville de sept cent mille âmes ne fut ainsi transformée. L’on entendoit de toutes parts des injures dirigées contre le palais des rois ; rien ne le défendoit plus qu’une sorte de respect qui servoit encore de barrière autour de cette antique demeure ; mais à chaque instant, cette barrière pouvoit être franchie, et tout alors étoit perdu.

On écrivoit des départemens qu’on envoyoit les hommes les plus furieux à Paris, pour célébrer le 14 juillet, et qu’ils n’y venoient que pour massacrer le roi et la reine. Le maire de Paris, Péthion, un froid fanatique, poussant à l’extrême toutes les idées nouvelles, parce qu’il étoit plus capable de les exagérer que de les comprendre ; Péthion, avec une niaiserie