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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/105

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CORINNE OU L’ITALIE

qu’elle n’avait pas éprouvé depuis long-temps. Aucun esprit, quelque distingué qu’il fût, ne pouvait l’étonner ; mais l’élévation et la dignité du caractère agissaient profondément sur elle. Lord Nelvil joignait à ces qualités une noblesse dans les expressions, une élégance dans les moindres actions de la vie, qui faisaient contraste avec la négligence et la familiarité de la plupart des grands seigneurs romains.

Bien que les goûts d’Oswald fussent à quelques égards différens de ceux de Corinne, ils se comprenaient mutuellement d’une façon merveilleuse. Lord Nelvil devinait les impressions de Corinne avec une sagacité parfaite, et Corinne découvrait, à la plus légère altération du visage de lord Nelvil, ce qui se passait en lui. Habituée aux démonstrations orageuses de la passion des Italiens, cet attachement timide et fier, ce sentiment prouvé sans cesse et jamais avoué, répandait sur sa vie un intérêt tout à fait nouveau. Elle se sentait comme environnée d’une atmosphère plus douce et plus pure, et chaque instant de la journée lui causait un sentiment de bonheur qu’elle aimait à goûter, sans vouloir s’en rendre compte.

Un matin, le prince Castel-Forte vint chez elle ; il était triste, elle lui en demanda la cause.