Aller au contenu

Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/174

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
CORINNE OU L’ITALIE

mais il se tut. Il y avait dans le regard de Corinne une expression de repentir et de timidité, qui ne lui permit pas de la juger avec rigueur, et il lui sembla qu’un rayon du ciel descendait sur elle pour l’absoudre. Il prit sa main, la serra contre son cœur, et se mit à genoux devant elle sans rien prononcer, sans rien promettre, mais en la contemplant avec un regard d’amour qui laissait tout espérer.

— Croyez-moi, dit Corinne à lord Nelvil, ne formons point de plan pour les années qui suivront. Les plus heureux momens de la vie sont encore ceux qu’un hasard bienfaisant nous accorde. Est-ce donc ici, est-ce donc au milieu des tombeaux qu’il faut tant croire à l’avenir ? — Non, s’écria lord Nelvil, non, je ne crois point à l’avenir qui nous séparerait ! Ces quatre jours d’absence m’ont trop bien appris que je n’existais plus maintenant que par vous. — Corinne ne répondit rien à ces douces paroles, mais elle les recueillit religieusement dans son cœur ; elle craignait toujours, en prolongeant l’entretien sur le sentiment qui seul l’occupait, d’exciter Oswald à déclarer ses projets avant qu’une plus longue habitude lui rendît la séparation impossible. Souvent même elle dirigeait à dessein son attention vers les objets extérieurs ; comme cette