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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/336

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CORINNE OU L’ITALIE

ciens on n’en a guères fait d’aussi belles. L’imagination du peintre comme celle d’un poëte a réuni tous les genres de malheur, et peut-être même y en a-t-il trop pour la pitié ; mais qui nous dit que c’est Bélisaire ? Ne faut-il pas être fidèle à l’histoire pour la rappeler, et quand on y est fidèle, est-elle assez pittoresque ? Après ces tableaux qui représentent dans Brutus les vertus qui ressemblent au crime ; dans Marius, la gloire, cause des malheurs ; dans Bélisaire, les services payés par les persécutions les plus noires, enfin toutes les misères de la destinée humaine que les événemens de l’histoire racontent chacun à sa manière, j’ai placé deux tableaux de l’ancienne école qui soulagent un peu l’ame oppressée en rappelant la religion qui a consolé l’univers asservi et déchiré, la religion qui donnait une vie au fond du cœur, quand tout au-dehors n’était qu’oppression et silence. Le premier est de l’Albane ; il a peint le Christ enfant endormi sur la croix. Voyez quelle douceur, quel calme dans ce visage ! quelles idées pures il rappelle, comme il fait sentir que l’amour céleste n’a rien à craindre de la douleur ni de la mort. Le Titien est l’auteur du second tableau ; c’est Jésus-Christ succombant sous le fardeau de la croix. Sa mère vient au-devant de lui. Elle se jette à genoux en l’apercevant. Admirable