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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/404

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CORINNE OU L’ITALIE

mortalité de l’ame. Que peut-on ajouter à ces idées sublimes, à leur union avec la vertu ! que peut-on y ajouter qui ne soit au-dessous d’elles ! L’enthousiasme poétique, qui vous donne tant de charmes, n’est pas, j’ose le dire, la dévotion la plus salutaire. Corinne, comment pourrait-on se préparer par cette disposition aux sacrifices sans nombre qu’exige de nous le devoir ? Il n’y avait de révélation que par les élans de l’ame, quand la destinée humaine, future et présente, ne s’offrait à l’esprit qu’à travers les nuages ; mais pour nous, à qui le christianisme l’a rendue claire et positive, le sentiment peut être notre récompense, mais il ne doit pas être notre seul guide : vous décrivez l’existence des bienheureux, et non pas celle des mortels. La vie religieuse est un combat, et non pas un hymne. Si nous n’étions pas condamnés à réprimer dans ce monde les mauvais penchans des autres et de nous-mêmes, il n’y aurait, en effet, d’autre distinction à faire qu’entre les ames froides et les ames exaltées. Mais l’homme est une créature plus âpre et plus redoutable que votre cœur ne vous le peint ; et la raison dans la piété, et l’autorité dans le devoir, sont un frein nécessaire à ses orgueilleux égaremens.

De quelque manière que vous considériez les