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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/410

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CORINNE OU L’ITALIE

yeux remplis de larmes, il consentit à partir avec elle, sans se rendre compte à lui-même de l’importance d’une telle résolution. Corinne fut au comble de la joie : car son cœur se fia tout-à-fait, dans ce moment, au sentiment d’Oswald. Le jour fut pris, et la douce perspective de voyager ensemble fit disparaître toute autre idée. Ils s’amusèrent à ordonner les détails de ce voyage, et il n’y avait pas un de ces détails qui ne fût une source de plaisir. Heureuse disposition de l’ame où tous les arrangemens de la vie ont un charme particulier, en se rattachant à quelque espérance du cœur ! Il ne vient que trop tôt le moment où l’existence fatigue dans chacune de ses heures comme dans son ensemble, où chaque matin exige un travail pour supporter le réveil, et conduire le jour jusqu’au soir.

Au moment où lord Nelvil sortait de chez Corinne afin de tout préparer pour leur départ, le comte d’Erfeuil y arriva, et apprit d’elle le projet qu’ils venaient d’arrêter ensemble. — Y pensez-vous, lui dit-il, quoi ! vous mettre en route avec lord Nelvil sans qu’il soit votre époux, sans qu’il vous ait promis de l’être ! Et que deviendrez-vous s’il vous abandonne ? — Ce que je deviendrais, répondit Corinne, dans toutes les situations de la vie, s’il cessait de m’aimer, la