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CORINNE OU L’ITALIE.

ma pauvre Thérésine qui avait consenti à me suivre, quoiqu’elle-ne cessât de pleurer en s’éloignant de sa patrie, mais il fallut me déshabituer de ces sons harmonieux, qui plaisent tant même aux étrangers, et dont le charme était uni pour moi à tous les souvenirs de l’enfance. Je m’avançais vers le nord ; sensation triste et sombre que j’éprouvais, sans en concevoir bien clairement la cause. Il y avait cinq ans que je n’avais vu mon père quand j’arrivai chez lui. Je pus à peine le reconnaître : il me sembla que sa figure avait pris un caractère plus grave ; cependant il me reçut avec un tendre intérêt, et me dit beaucoup que je ressemblais à ma mère. Ma petite sœur, qui avait alors trois ans, me fut amenée ; c’était la figure la plus blanche, les cheveux de soie les plus blonds que j’eusse jamais vus. Je la regardai avec étonnement ; car nous n’avons presque pas de ces figures en Italie, mais dès ce moment elle m’intéressa beaucoup ; je pris ce jour là même de ses cheveux, pour en faire un bracelet, que j’ai toujours conservé depuis. Enfin, ma belle-mère parut, et l’impression qu’elle me fit la première fois que je la vis s’est constamment accrue et renouvelée pendant les six années que j’ai passées avec elle.

Lady Edgermond aimait exclusivement la