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CORINNE OU L’ITALIE.

comment une personne d’un esprit si supérieur suivait ainsi les pratiques populaires. Elle aperçut ce qu’il pensait par ses regards, et lui dit : — Cher Oswald, n’arrive-t-il pas souvent que l’on n’ose élever ses vœux jusques à l’Être suprême ? Comment lui confier toutes les peines du cœur ? N’est-il donc pas doux alors de pouvoir considérer une femme comme l’intercesseur des faibles humains ! Elle a souffert sur cette terre, puisqu’elle y a vécu ; je l’implorais pour vous avec moins de rougeur ; la prière directe m’eût semblé trop imposante. — Je ne la fais pas non plus toujours cette prière directe, répondit Oswald ; j’ai aussi mon intercesseur, l’ange gardien des enfans, c’est leur père ; et depuis que le mien est dans le ciel, j’ai souvent éprouvé dans ma vie des secours extraordinaires, des momens de calme sans cause, des consolations inattendues ; c’est aussi dans cette protection miraculeuse que j’espère, pour sortir de ma perplexité. — Je vous comprends, dit Corinne, il n’y a personne, je crois, qui n’ait au fond de son ame une idée singulière et mystérieuse sur sa propre destinée. Un événement qu’on a toujours redouté, sans qu’il fût vraisemblable, et qui pourtant arrive ; la punition d’une faute, quoiqu’il soit impossible de