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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/327

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CORINNE OU L’ITALIE.

Mais Corinne était libre ; elle ne sacrifiait que sa gloire et son repos. Il n’y avait point de raison, point de prudence dans sa conduite, mais rien, qui pût offenser une autre destinée que la sienne, et son funeste amour ne perdait qu’elle-même.

En débarquant en Angleterre, Corinne sut par les papiers publics que le départ du régiment de lord Nelvil était encore retardé. Elle ne vit à Londres que la société du banquier auquel elle était recommandée sous un nom supposé. Il s’intéressa d’abord à elle, et s’empressa, ainsi que sa femme et sa fille, à lui rendre tous les services imaginables. Elle tomba dangereusement malade en arrivant, et pendant quinze jours ses nouveaux amis la soignèrent avec la bienveillance la plus tendre. Elle apprit que lord Nelvil était en Écosse, mais qu’il devait revenir dans peu de jours à Londres, où son régiment se trouvait alors. Elle ne savait comment se résoudre à lui annoncer qu’elle était en Angleterre. Elle ne lui avait point écrit son départ ; et son embarras était tel à cet égard, que depuis un mois Oswald n’avait point reçu de ses lettres. Il commençait à s’en inquiéter vivement : il l’accusait de légèreté, comme s’il avait eu le droit de s’en plaindre. En arrivant à Londres, il alla d’abord chez son banquier,