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CORINNE OU L’ITALIE.

femme qui ne pouvait faire un pas en Italie sans que la foule des hommages se précipitât sur ses pas ! Et faut-il qu’un seul sentiment dépouille ainsi toute la vie ? Enfin, après huit jours d’angoisses inexprimables, elle reprit sa triste route ; car, bien que l’espérance de voir Oswald en fut le terme, il y avait tant de pénibles sentimens confondus avec cette vive attente, que son cœur n’en éprouvait qu’une inquiétude douloureuse. Avant d’arriver à la demeure de lord Nelvil, Corinne eut le désir de s’arrêter quelques heures dans la terre de son père qui n’en était pas éloignée, et où lord Edgermond avait ordonné que son tombeau fût placé. Elle n’y avait point été depuis ce temps, et elle n’avait passé dans cette terre qu’un mois, seule avec son père. C’était l’époque la plus heureuse de son séjour en Angleterre. Ces souvenirs lui inspiraient le besoin de revoir cette habitation, et elle ne croyait pas que lady Edgermond dût y être déjà.

À quelques milles du château, Corinne aperçut sur le grand chemin une voiture renversée. Elle fit arrêter la sienne, et vit sortir de celle qui était brisée un vieillard très-effrayé de la chute qu’il venait de faire. Corinne se hâta de le secourir, et lui offrit de le conduire elle-même jusqu’à la ville voisine. Il accepta avec reconnaissance,