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CORINNE OU L’ITALIE.

me séparerez pas de ma mère ? — Cette aimable manière d’annoncer son consentement intéressa beaucoup Oswald. Il se mit à genoux a son tour, et pria lady Edgermond de permettre que le visage de Lucile se penchât vers le sien ; et c’est ainsi que cette innocente personne reçut la première impression qui la faisait sortir de l’enfance. Une vive rougeur couvrit son front ; Oswald sentit en la regardant quel lien pur et sacré il venait de former, et la beauté de Lucile, quelque ravissante qu’elle fût en ce moment, lui fit moins d’impression encore que sa céleste modestie.

Les jours qui précédèrent le dimanche qui avait été fixé pour la cérémonie se passèrent en arrangemens nécessaires pour le mariage. Lucile, pendant ce temps, ne parla pas beaucoup plus qu’à l’ordinaire ; mais ce qu’elle disait était noble et simple ; et lord Nelvil aimait et approuvait chacune de ses paroles. Il sentait bien cependant quelque vide auprès d’elle ; la conversation consistait toujours dans une question et une réponse ; elle ne s’engageait pas, elle ne se prolongeait pas ; tout était bien, mais il n’y avait pas ce mouvement, cette vie inépuisable, dont il est difficile de se passer quand une fois on en a joui. Lord Nelvil se rappelait alors Corinne ;