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CORINNE OU L’ITALIE.

Oswald et lady Nelvil ne pouvaient faire un pas sans être assaillis par une quantité de mendians, qui sont en général le fléau de l’Italie. En passant devant les prisons de Bologne, dont les Barreaux donnent sur la rue, les détenus se livraient à la joie la plus déplaisante ; ils s’adressaient aux passans d’une voix de tonnerre, et demandaient des secours avec des plaisanteries ignobles et des rires immodérés ; enfin tout donnait l’idée dans ce lieu d’un peuple sans dignité. — Ce n’est pas ainsi, dit Lucile, que se montre en Angleterre notre peuple concitoyen de ses chefs. Oswald, un tel pays peut-il vous plaire ? — Dieu me préserve, répondit Oswald, de jamais renoncer à ma patrie ; mais quand vous aurez passé les Apennins, vous entendrez parler le toscan ; vous verrez le véritable midi ; vous connaîtrez le peuple spirituel et animé de ces contrées, et vous serez, je le crois, moins sévère pour l’Italie. —

On peut juger la nation italienne, suivant les circonstances, d’une manière tout-à-fait différente. Quelquefois le mal qu’on en a dit si souvent s’accorde avec ce que l’on voit ; et d’autres fois il paraît souverainement injuste. Dans un pays où la plupart des gouvernemens étaient sans garantie, et l’empire de l’opinion presque aussi