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CORINNE OU L’ITALIE.

fête se réveillèrent tout entiers dans l’imagination de lord Nelvil ; et comme il trouvait du plaisir à s’y livrer, le prince Castel-Forte le prit par la main, et tirant un rideau de crêpe qui couvrait un autre tableau, il lui montra Corinne telle qu’elle avait voulu se faire peindre cette année même en robe noire, d’après le costume qu’elle n’avait point quitté depuis son retour d’Angleterre. Oswald se rappela tout à coup l’impression que lui avait faite une femme vêtue ainsi qu’il avait aperçue à Hydepark ; mais ce qui le frappa surtout, c’est l’inconcevable changement de la figure de Corinne. Elle était là, pâle comme la mort, les yeux à demi-fermés, et ses longues paupières voilaient ses regards et réfléchissaient une ombre sur ses joues sans couleur. Au bas du portrait était écrit ce vers du Pastor Fido :

A pena si puo dir : questa fu rosa[1]

Quoi ! dit lord Nelvil, c’est ainsi qu’elle est maintenant ? — Oui, répondit le prince Castel-Forte, et depuis quinze jours plus mal encore. — À ces mots, lord Nelvil sortit comme un insensé : l’excès de sa peine troublait sa raison.

  1. . À peine peut-on dire : elle fut une rose.