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CORINNE OU L’ITALIE.

un autre, mais quand elle m’arrive, je me dis que cela passera, et je me tiens toujours parole — Mais, lui répondis-je, en cherchant à rester comme lui dans les idées générales, car je ne pouvais ni ne voulais lui témoigner aucune confiance ; quand on pourrait écarter le sentiment, il resterait toujours l’honneur et la vertu, qui s’opposent souvent à nos désirs en tout genre. — L’honneur, reprit M. de Maltigues : entendez-vous, par l’honneur, se battre quand on est insulté ? à cet égard il n’y a pas de doute ; mais sous tous les autres rapports, quel intérêt aurait-on à se laisser entraver par mille délicatesses vaines ? — Quel intérêt ! interrompis-je, il me semble que ce n’est pas là le mot dont il s’agit. — À parler sérieusement, continua M. de Maltigues, il en est peu qui aient un sens aussi clair ; je sais bien qu’autrefois bon disait : Un honorable malheur, un glorieux revers. Mais aujourd’hui que tout le monde est persécuté, les coquins, comme ce qu’on est convenu d’appeler les honnêtes gens, il n’y a de différence dans ce monde qu’entre les oiseaux pris au filet et ceux qui y ont échappé. — Je crois à une autre différence, lui répondis-je, la prospérité méprisée et les revers honorés par l’estime des hommes de bien. — Trouvez-les-moi donc, reprit M. de