Dès lors, le Canada fut un peu délaissé. Il avait perdu d’ailleurs son grand administrateur. L’agent si dévoué de Colbert, l’intendant Talon, avait été remplacé par des successeurs, pleins de zèle comme lui, mais d’un génie d’organisation moins puissant ; après lui on peut considérer comme terminée la période de création de la colonie.
Les encouragements officiels à l’immigration cessèrent entièrement. On ne vit plus ces grands convois faisant voile vers l’Amérique, tout chargés, pour ces terres vierges, de populations nouvelles, pleines d’énergie et d’espérance. La colonie n’eut plus à compter pour s’accroître que sur sa propre vigueur, sur quelques immigrations individuelles et sur les engagés.
L’impulsion donnée par Colbert avait toutefois été si forte que, même ainsi livrée à elle-même, ses progrès furent encore considérables. Malgré les guerres perpétuelles et quelquefois malheureuses qui marquèrent la fin du règne de Louis XIV, la population canadienne s’élevait en 1713 à 18,000 âmes ; et le recensement de 1739, le dernier qui fut fait sous la domination française, nous la montre atteignant le chiffre de 42,000 !
Ce n’est pas que le gouvernement se désintéressât entièrement de la colonie. Il consacrait même chaque année d’assez fortes sommes à son entretien ; mais ses efforts n’étaient pas toujours dirigés de la façon la plus judicieuse et la plus prévoyante. On négligeait l’essentiel pour ne prêter d’attention qu’à