CLXX.
Si l’on veut séparer un instant de l’amour le charme idéal dont il nous enivre pendant quelques années de notre jeunesse, on trouvera que, loin de contribuer au bonheur, il est la source de presque tous les désordres qui affligent l’humanité. Son premier effet est d’envahir ou de comprimer les affections de la nature ; de nous isoler de tout ce qui jusque-là a rempli notre âme et occupé notre esprit ; de nous faire négliger ou abandonner nos études, nos amusements, et de s’emparer avec tant de force de nos sensations que tout ce qui y est étranger, même ce qui a le plus de droits à notre reconnaissance, nous devient à charge. Si cet amour est violent, s’il est contrarié, s’il se complique de la dangereuse passion de l’orgueil où de la jalousie, du désespoir que lui donne un refus ou une impossibilité, que de malheurs n’en peuvent-ils pas résulter ! Sans parler des crimes affreux qu’il a fait commettre dans ce siècle d’emportement et d’oubli de