Page:De Vauban - Projet de dixme royale, 1707.djvu/35

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C' est cependant une vérité constante, et on en conviendra sans peine, si on veut bien faire attention, que ce n' est pas la grande quantité d' or et d' argent qui font les grandes et veritables richesses d' un etat, puis qu' il y a de trés-grands païs dans le monde qui abondent en or et en argent, et qui n' en sont pas plus à leur aise, ni plus heureux. Tels sont le Perou, et plusieurs etats de l' Amerique, et des Indes Orientales et Occidentales, qui abondent en or et en pierreries, et qui manquent de pain. La vraye richesse d' un royaume consiste dans l' abondance des denrées, dont l' usage est si necessaire au soûtien de la vie des hommes, qu' ils ne sçauroient s' en passer.

Or on peut dire que la France possede cette abondance au suprême degré, puisque de son superflu elle peut grassement assister ses voisins, qui sont obligez de venir chercher leurs besoins chez elle, en échange de leur or et de leur argent ; que si avec cela elle reçoit quelques-unes de leurs denrées, ce n' est que pour faciliter le commerce, et satisfaire au luxe de ses habitans ; hors cela elle pourroit trés-bien s' en passer.

Les denrées qu' elle debite le plus communément aux etrangers, sont les vins, les eaux de vie, les sels, les bleds et les toilles. Elle fournit aussi les modes, une infinité d' etoffes qui se fabriquent dans ses manufactures mieux qu' en aucun autre endroit du monde, ce qui luy attire