sinon supérieure, et de fortune proportionnée ; mais en beauté, en esprit et en mille qualités, supérieure, non pas à la plupart des femmes, mais à son sexe tout entier ; et quant à sa vertu, on ne pouvait l’apprécier justement qu’en la considérant non seulement comme la meilleure des princesses, mais même comme la meilleure des femmes.
Ils vivaient dans la plus grande harmonie, car avec une telle princesse il était impossible qu’il en fût autrement. Néanmoins, elle ne laissait pas de sentir que son époux avait ses faibles, qu’il faisait certains écarts, et particulièrement qu’il avait une maîtresse favorite, laquelle l’absorbait parfois plus qu’elle n’aurait pu le désirer ou en prendre aisément son parti. Cependant, c’était une femme si bonne, si généreuse, si vraiment tendre, qu’elle ne lui donna jamais aucun ennui à ce sujet, si ce n’est celui que devait lui causer le sentiment qu’il avait de la patience avec laquelle elle supportait l’outrage et de son profond respect pour lui, patience et respect tels qu’ils auraient pu suffire à le réformer, et que son généreux esprit en était parfois gêné au point de l’obliger à garder la maison, si je puis m’exprimer ainsi, pendant un long temps de suite. Je ne tardai pas, non seulement à m’apercevoir de cela par ses absences, mais à en connaître réellement la raison, et une ou deux fois même il en convint devant moi.
C’était un point qu’il ne m’appartenait pas de régler. J’eus l’air une ou deux fois de lui proposer de me laisser et de se consacrer à elle, comme il le devait faire suivant les lois et rites du mariage, et, pour le persuader, je mis en avant la générosité de la princesse à son égard. Mais c’était de l’hypocrisie ; car si j’avais obtenu de lui qu’il fût réellement honnête, je l’aurais perdu, chose dont je ne pouvais supporter la pensée ; et il lui était facile de voir que je ne parlais pas sérieusement. Une fois particulièrement que j’avais pris sur moi de parler dans ce sens, je vis, comme j’insistais avec force sur la vertu, l’honneur, la naissance, et par dessus tout sur le généreux traitement qu’il trouvait chez la princesse relativement à ses amours cachées, disant que cela devrait emporter sa résolution, etc., je vis qu’il commençait à être touché ; et il répliqua :