Page:Defoe - Lady Roxana.djvu/268

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à Londres avec tous ses biens, et a le plaisir de se dire qu’il ne se risquera jamais plus sur la mer.

Aussitôt que nous fûmes mariés, nous revînmes à mon logis, car l’église était tout auprès ; et notre mariage fut si secret que personne autre qu’Amy et mon amie la Quakeresse n’en fut informé. En entrant dans la maison, il me prit dans ses bras, et, me baisant :

« Enfin vous êtes à moi, maintenant ! dit-il. Oh ! que vous auriez été bonne de faire cela il y a onze ans !

» — Vous seriez peut-être fatigué de moi depuis longtemps, répondis-je. Il vaut bien mieux que ce soit maintenant ; car maintenant tous nos jours de bonheur sont à venir. D’ailleurs, ajoutai-je, je n’aurais pas été si riche de moitié. — Mais cela, je l’ajoutai en moi-même, car il était inutile de l’initier à cette raison.

» — Oh ! reprit-il, je n’aurais pas été fatigué de vous. Au contraire, outre la satisfaction de vous avoir près de moi, cela m’aurait épargné cette malheureuse catastrophe, à Paris, qui a été pour moi une perte sèche de plus de huit mille pistoles, et toutes les fatigues de tant d’années d’affaires et de soucis. Puis il ajouta : — Mais je vous ferai payer tout cela, maintenant que je vous ai. »

Je tressaillis légèrement à ce mot.

« Vraiment ! dis-je, menacez-vous déjà ? Que voulez-vous dire par là, je vous prie. »

Et je pris un air assez grave.

« Je vais vous dire très simplement ce que j’entends, me répondit-il en me tenant toujours étroitement dans ses bras. Je compte, à partir de ce moment ne plus m’inquiéter d’aucune affaire, de sorte que je ne gagnerai jamais pour vous un seul shilling de plus que ce que je possède déjà. Vous perdrez donc tout cela, d’un côté. En second lieu, je compte ne prendre aucune peine ni aucun souci à administrer ce que vous m’apportez ou ce que j’ai à y ajouter. Mais vous prendrez tout cela sur vous ; comme le font les femmes en Hollande ; et de cette façon vous le payerez aussi, car toute la mauvaise besogne sera pour vous. En troisième lieu, je compte vous condamner à la