Page:Defoe - Lady Roxana.djvu/356

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pensée soudaine, elle frappa un coup hardi qui, tout dangereux qu’il était s’il avait porté à faux, eut l’effet désiré.

Elle lui dit que, pour ce qui était de renvoyer la voiture, ce serait comme il lui plairait. Elle croyait qu’elle ne trouverait pas facilement un logement dans la ville ; mais, comme elle était en un lieu étranger, elle serait assez son amie pour parler aux gens de la maison, afin que, s’ils avaient de la place, elle pût y loger une nuit plutôt que d’être forcée à retourner à Londres lorsque quelque chose la retenait encore ici.

C’était une démarche à la fois habile et dangereuse ; mais elle réussit, car elle abusa entièrement la fille, qui en conclut immédiatement que je ne pouvais réellement pas être là pour le moment ; autrement on ne l’aurait jamais invitée à coucher dans la maison. Ainsi se refroidit-elle tout de suite sur l’idée de loger là ; elle dit que non ; puisqu’il en était ainsi, elle s’en retournerait cette même après-midi ; mais elle reviendrait dans deux ou trois jours pour fouiller l’endroit et toutes les localités avoisinantes d’une manière efficace, quand même elle resterait une ou deux semaines à la faire ; car, en deux mots, que je fusse en Angleterre ou en Hollande, elle me trouverait.

« En vérité, dit alors la Quakeresse, tu vas me rendre très nuisible pour toi, alors ?

» — Pourquoi cela ? demanda-t-elle.

» — Parce que, partout où j’irai, tu te mettras en grands frais, et tu troubleras tout le pays d’une façon fort inutile.

» — Non pas inutile, dit-elle.

» — Si vraiment, reprit la Quakeresse. Il faut que ce soit inutile, puisque cela ne servira de rien. Je crois qu’il vaudra mieux que je reste chez moi, pour t’épargner cette dépense et cet ennui. »

Elle ne répondit pas grand’chose à cela, si ce n’est qu’elle lui donnerait aussi peu d’ennui que possible ; qu’elle craignait parfois de la gêner, mais qu’elle espérait qu’elle voudrait bien l’excuser. Ma Quakeresse lui déclara qu’elle l’excuserait bien plus volontiers si elle voulait s’abstenir. Car, si elle voulait la croire, elle l’assurait qu’elle n’obtiendrait jamais d’elle aucun renseignement sur moi.