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MOLL FLANDERS

nées. Et d’ailleurs, ajoutai-je, j’ai l’intention de vous en donner la plus grande partie tout à l’heure.

Il avait paru un peu mécontenté de sa façon de parler, autant que moi ; trouvant, ainsi que je pensais bien, qu’elle prenait un peu trop de liberté ; mais quand il vit la réponse que je lui faisais, il se remit sur-le-champ. Le lendemain matin nous en reparlâmes, et je le trouvai pleinement satisfait. Il me dit en souriant qu’il espérait que je ne me laisserais point manquer d’argent sans le lui dire, et que je lui avais promis le contraire ; je lui répondis que j’avais été fort vexée de ce que ma propriétaire eût parlé si ouvertement la veille d’une chose où elle n’avait point à se mêler ; mais que j’avais supposé qu’elle désirait être payée de ce que je lui devais, qui était environ huit guinées, que j’avais résolu de lui donner et lui avais données la même nuit.

Il fut dans une extraordinaire bonne humeur quand il m’entendit dire que je l’avais payée, puis passa à quelque autre discours pour le moment ; mais le lendemain matin, ayant entendu que j’étais levée avant lui, il m’appela, et je lui répondis. Il me demanda d’entrer dans sa chambre ; il était au lit quand j’entrai, et il me fit venir m’asseoir sur le bord du lit, car il me dit qu’il avait quelque chose à me dire. Après quelques expressions fort tendres, il me demanda si je voulais me montrer bien honnête et donner une réponse sincère à une chose dont il me priait. Après une petite chicane sur le mot « sincère », et lui avoir demandé si jamais je lui avais donné des réponses qui ne fussent pas sincères, je lui fis la promesse qu’il voulait. Eh bien, alors, sa prière était, dit-il, de lui faire voir ma bourse ; je mis aussitôt ma main dans ma poche, et riant