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Page:Defoe - Moll Flanders, trad. Schowb, ed. Crès, 1918.djvu/202

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MOLL FLANDERS

— Mais, dis-je, que disais-je ? Car je ne lui avais pas nommé les paroles.

— Tu criais à haute voix, et tu disais : « Ô Jemmy ! ô Jemmy ! reviens, reviens. »

Je me mis à rire.

— Mon cœur, dit-il, ne ris pas ; car sois-en sûre, j’ai entendu ta voix aussi clairement que tu entends la mienne dans ce moment ; et, si tu le veux, j’irai devant un magistrat prêter serment là-dessus.

Je commençai alors d’être surprise et étonnée ; je fus effrayée même et lui dis ce que j’avais vraiment fait et comment je l’avais appelé. Après que nous nous fûmes amusés un moment là-dessus, je lui dis :

— Eh bien, tu ne t’en iras plus loin de moi, maintenant ; j’irais plutôt avec toi au bout du monde.

Il me dit que ce serait une chose bien difficile pour lui que de me quitter, mais que, puisqu’il le fallait, il avait l’espoir que je lui rendrais la tâche aisée autant que possible ; mais que pour lui, ce serait sa perte, et qu’il le prévoyait assez.

Cependant, il me dit qu’il avait réfléchi, qu’il me laissait seule pour aller jusqu’à Londres, qui était un long voyage, et qu’il pouvait aussi bien prendre cette route là qu’une autre ; de sorte qu’il s’était résolu à m’y accompagner, et que s’il partait ensuite sans me dire adieu, je n’en devais point prendre d’irritation contre lui, et ceci il me le fit promettre.

Il me dit comment il avait congédié ses trois domestiques, vendu leurs chevaux, et envoyé ces garçons chercher fortune, tout cela en fort peu de temps, dans une ville près de la route, je ne sais où, « et, dit-il, il m’en a