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MOLL FLANDERS

dans son affaire qui ne fussent très bonnes personnes, et telles qu’on pouvait y avoir confiance.

Je ne pus rien dire sur le contraire, et fus donc obligée de dire :

— Madame, je ne doute point que vous n’agissiez parfaitement sur votre part ; mais la principale question est ce que font ces gens.

Et de nouveau elle me ferma la bouche en répondant qu’elle en prenait le soin le plus exact.

La seule chose que je trouvai dans toute sa conversation sur ces sujets qui me donnât quelque déplaisir fut qu’une fois où elle me parlait de mon état bien avancé de grossesse, elle dit quelques paroles qui semblaient signifier qu’elle pourrait me débarrasser plus tôt si j’en avais envie, et me donner quelque chose pour cela, si j’avais le désir de mettre ainsi fin à mes tourments ; mais je lui fis voir bientôt que j’en abhorrais jusqu’à l’idée ; et pour lui rendre justice elle s’y prit si adroitement que je ne puis dire si elle l’entendait réellement ou si elle ne fit mention de cette pratique que comme une horrible chose ; car elle glissa si bien ses paroles et comprit si vite ce que je voulais dire, qu’elle avait pris la négative avant que je pusse m’expliquer.

Pour abréger autant que possible cette partie, je quittai mon logement de Saint-Jones et j’allai chez ma nouvelle gouvernante (car c’est ainsi qu’on la nommait dans la maison), et là, en vérité, je fus traitée avec tant de courtoisie, soignée avec tant d’attention, tout me parut si bien, que j’en fus surprise et ne pus voir d’abord quel avantage en tirait ma gouvernante : mais je découvris ensuite qu’elle faisait profession de ne tirer aucun profit