Page:Defoe - Moll Flanders, trad. Schowb, ed. Crès, 1918.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
54
MOLL FLANDERS

histoires à mon compte ; je ne trafique pas de ces sortes de marchandises ; je n’ai rien à dire à aucune Mme Betty dans la paroisse.

Et, là-dessus, il se leva et décampa.

— Non, dit la sœur aînée, je me fais forte de répondre pour mon frère, il connaît mieux le monde.

Ainsi se termina ce discours, qui laissait le frère aîné confondu ; il conclut que son frère avait tout entièrement découvert, et se mit à douter si j’y avais ou non pris part ; mais, malgré toute sa subtilité, il ne put parvenir à me joindre ; enfin, il tomba dans un tel embarras, qu’il en pensa désespérer et résolut qu’il me verrait quoiqu’il en advînt. En effet, il s’y prit de façon qu’un jour, après dîner, guettant sa sœur aînée jusqu’à ce qu’il la vît monter l’escalier, il court après elle.

— Écoute, ma sœur, dit-il, où donc est cette femme malade ? Est-ce qu’on ne peut pas la voir ?

— Si, dit la sœur, je crois que oui ; mais laisse-moi d’abord entrer un instant, et puis je te le dirai.

Ainsi elle courut jusqu’à ma porte et m’avertit, puis elle lui cria :

— Mon frère, dit-elle, tu peux rentrer s’il te plaît.

Si bien qu’il entra, semblant perdu dans la même sorte de fantaisie :

— Eh bien, dit-il à la porte, en entrant, où est donc cette personne malade qui est amoureuse ? Comment vous trouvez-vous, madame Betty ?

J’aurais voulu me lever de ma chaise, mais j’étais si faible que je ne le pus pendant un bon moment ; et il le vit bien, et sa sœur aussi, et elle dit  :

— Allons, n’essayez pas de vous lever, mon frère ne