Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 1.djvu/125

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main droite ; et puis, tournant encore à droite, je poursuivais jusqu’à ce que je l’eusse percé à jour, pour me faire une porte de sortie sur l’extérieur de ma palissade ou de mes fortifications.

Non-seulement cela me donna une issue et une entrée, ou, en quelque sorte, un chemin dérobé pour ma tente et mon magasin, mais encore de l’espace pour ranger tout mon attirail.

J’entrepris alors de me fabriquer les meubles indispensables dont j’avais le plus besoin, spécialement une chaise et une table. Sans cela je ne pouvais jouir du peu de bien-être que j’avais en ce monde ; sans une table, je n’aurais pu écrire ou manger, ni faire quantité de choses avec tant de plaisir.

Je me mis donc à l’œuvre ; et ici je constaterai nécessairement cette observation, que la raison étant l’essence et l’origine des mathématiques, tout homme qui base chaque chose sur la raison, et juge des choses le plus raisonnablement possible, peut, avec le temps, passer maître dans n’importe quel art mécanique. Je n’avais, de ma vie, manié un outil ; et pourtant, à la longue, par mon travail, mon application, mon industrie, je reconnus enfin qu’il n’y avait aucune des choses qui me manquaient que je n’eusse pu faire, surtout si j’avais eu des instruments. Quoi qu’il en soit, sans outils, je fabriquai quantité d’ouvrages ; et seulement avec une hache et une herminette, je vins à bout de quelques-uns qui, sans doute, jusque-là, n’avaient jamais été faits ainsi ; mais ce ne fut pas sans une peine infinie. Par exemple, si j’avais besoin d’une planche, je n’avais pas d’autre moyen que celui d’abattre un arbre, de le coucher devant moi, de le tailler des deux côtés avec ma cognée jusqu’à le rendre suffisamment mince, et de le dres-