Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 1.djvu/196

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fut pour moi de me retrouver dans ma vieille huche[1], et de me coucher dans mon hamac. Ce petit voyage à l’aventure, sans retraite assurée, n’avait été si désagréable, que ma propre maison me semblait un établissement parfait en comparaison ; et cela me fit si bien sentir le confortable de tout ce qui m’environnait, que je résolus de ne plus m’en éloigner pour un temps aussi long, tant que mon sort me retiendrait sur cette île.

Je me reposai une semaine pour me restaurer et me régaler après mon long pèlerinage. La majeure partie de ce temps fut absorbée par une affaire importante, la fabrication d’une cage pour mon Poll, qui commençait alors à être quelqu’un de la maison et à se familiariser parfaitement avec moi. Je me ressouvins enfin de mon pauvre biquet que j’avais parqué dans mon petit enclos, et je résolus d’aller le chercher et de lui porter quelque nourriture. Je m’y rendis donc, et je le trouvai où je l’avais laissé : — au fait il ne pouvait sortir —, mais il était presque mourant de faim. J’allai couper quelques rameaux aux arbres et quelques branches aux arbrisseaux que je pus trouver, et je les lui jetai. Quand il les eut broutés, je le liai comme j’avais fait auparavant et je l’emmenai ; mais il était si maté par l’inanition, que je n’aurais pas même eu besoin de le tenir en laisse : il me suivit comme un chien. Comme je continuai de le nourrir, il devint si aimant, si gentil, si doux, qu’il fut dès lors un de mes serviteurs, et que depuis il ne voulut jamais m’abandonner.

La saison pluvieuse de l’équinoxe automnal était revenue. J’observai l’anniversaire du 30 septembre, jour de mon débarquement dans l’île, avec la même solennité

  1. Into my old hutch. Hutch, huche ou lapinière.