Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 1.djvu/418

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examiner. Le capitaine connaissait la physionomie et le caractère de touts les hommes qui se trouvaient dans l’embarcation ; il m’assura qu’il y avait parmi eux trois honnêtes garçons, qui, dominés et effrayés, avaient été assurément entraînés dans le complot par les autres.

Mais quant au maître d’équipage, qui semblait être le principal officier, et quant à tout le reste, ils étaient aussi dangereux que qui que ce fût du bâtiment, et devaient sans aucun doute agir en désespérés dans leur nouvelle entreprise. Enfin il redoutait véhémentement qu’ils ne fussent trop forts pour nous.

Je me pris à sourire, et lui dis que des gens dans notre position étaient au-dessus de la crainte ; que, puisque à peu près toutes les conditions possibles étaient meilleures que celle où nous semblions être, nous devions accueillir toute conséquence résultante, soit vie ou mort, comme un affranchissement. Je lui demandai ce qu’il pensait des circonstances de ma vie, et si ma délivrance n’était pas chose digne d’être tentée. — « Et qu’est devenue, sir, continuai-je, votre créance que j’avais été conservé ici à dessein de vous sauver la vie, créance qui vous avait exalté il y a peu de temps ? Pour ma part, je ne vois qu’une chose malencontreuse dans toute cette affaire. » — « Eh quelle est-elle ? » dit-il. — « C’est, répondis-je, qu’il y a parmi ces gens, comme vous l’avez dit, trois ou quatre honnêtes garçons qu’il faudrait épargner. S’ils avaient été touts le rebut de l’équipage, j’aurais cru que la providence de Dieu les avait séparés pour les livrer entre nos mains ; car faites fond là-dessus : tout homme qui mettra le pied sur le rivage sera nôtre, et vivra ou mourra suivant qu’il agira envers nous. »

Ces paroles, prononcées d’une voix ferme et d’un air