Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/112

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et en dispersèrent les débris, de manière à ne rien laisser debout et à rendre en quelque sorte méconnaissable l’emplacement qu’elles avaient occupé ; ils mirent en pièces tout leur petit mobilier, et l’éparpillèrent de telle façon que les pauvres gens retrouvèrent plus tard, à un mille de distance de leur habitation, quelques-uns des objets qui leur avaient appartenu.

Cela fait, ils arrachèrent touts les jeunes arbres que ces pauvres gens avaient plantés, ainsi que les clôtures qu’ils avaient établies pour mettre en sûreté leurs bestiaux et leur grain ; en un mot ils saccagèrent et pillèrent toute chose aussi complètement qu’aurait pu le faire une horde de Tartares.

Pendant ce temps les deux hommes étaient allés à leur recherche, décidés à les combattre partout où ils les trouveraient, bien que n’étant que deux contre trois : en sorte que s’ils se fussent rencontrés il y aurait eu certainement du sang répandu ; car, il faut leur rendre cette justice, ils étaient touts des gaillards solides et résolus.

Mais la Providence mit plus de soin à les séparer qu’ils n’en mirent eux-mêmes à se joindre : comme s’ils s’étaient donné la chasse, les trois vauriens étaient à peine partis que les deux honnêtes gens arrivèrent ; puis quand ces deux-ci retournèrent sur leurs pas pour aller à leur rencontre, les trois autres étaient revenus à la vieille habitation. Nous allons voir la différence de leur conduite. Quand les trois drôles furent de retour, encore furieux, et échauffés par l’œuvre de destruction qu’ils venaient d’accomplir, ils abordèrent les Espagnols par manière de bravade et comme pour les narguer, et ils leur dirent ce qu’ils avaient fait ; l’un d’entre eux même, s’approchant de l’un des Espagnols, comme un polisson qui jouerait avec un autre, lui ôta